«Ranz des Vaches» La partition retrouvée
En Suisse et dans le Jura français, l'abbé Bovet est connu pour la fameuse chanson "Le Ranz des vaches", aujourd'hui établie en hymne régional et qui fait désormais l'objet d'un concours annuel de chant auquel participent les voix les plus toniques de la région. Mais c'est dans une centaines de langues qu'a été traduit "Le Vieux Chalet", chanson entrée dans le patrimoine européen des scouts et des colonies de vacances.La nouvelle est d'importance: on connaît désormais un des auteurs du «Ranz des vaches». Il s'agit d'un moine du couvent de La Part-Dieu, Frère Angelo. Mais comment diable a-t-on pu remonter à cette source du début du XVIe siècle? Une vraie saga.
On retient donc du style de Joseph Bovet qu'il est fort simple. Mais une simplicité réussie n'est pas à la portée de tous, loin de là.
Cett simplicité, c'est l'Abbé lui même qui en parle le mieux lorsqu'il évoque sa Suisse natale : "Mon Pays que j'ai servi à ma manière, de tout mon coeur, en le célébrant par mes chansons. Mon Pays que je continue à chanter jusqu'au dernier souffle de ma vie. Car il est vrai de dire que ce peuple, je l'ai aimé et je l'aime profondément. Mon but, en écrivant des chansons pour lui, a été de lui donner de la joie, de l'aider dans son labeur de tous les jours, de faire luire à ses yeux sans qu'elle s'éteigne, la flamme généreuse de l'espérance, du courage, de l'optimisme. C'est cela que j'ai voulu. J'y ai mis tous mes efforts et toute ma foi. J'y ai mis une sincérité rigoureuse. Ai-je réussi ma tâche ? Il est encore trop tôt pour le dire. En tout cas, mes chansons, je ne les ai pas écrites comme un simple compositeur, mais comme un prêtre aussi, et ce fut là mon ministère et mon apostolat."
Le compositeur des alpages ne devrait pas éclipser le compositeur de Musique Sacrée, mais son succès en a décidé autrement. On se fera une opinion avec "Nouthra Dona di Maortse" (Notre-Dame des Marches, lieu de pèlerinage suisse), pièce toute empreinte de piété populaire, mais ô combien priante. L'Abbé Bovet y révèle un phrasé à la fois coulant, dynamique, et plein de dévotion.
Nouthra Dona di Maortse (cantique en patois fribourgeois)
http://www.chant-liturgique-paroisse.fr/comp.bovet/nouthra-dona_bovet.mp3
CD Ascende huc, chœur Les Rives du Rhône, DO 65146, 1995.
«J'avais le cœur battant!» Un peu qu'il s'en souvient, Albert Visinand, de ce moment où il a constaté qu'il avait en main la partition du Ranz des vaches. Brocanteur dans le Pays-d'Enhaut, il s'occupe notamment du débarras de caves et galetas. «On m'avait demandé pour un débarras après décès, dans une ferme. Au grenier, j'ai emporté, sans y prêter spécialement attention, un carton avec des liasses de papier ficelées. Du tout-venant! Ce n'est que de retour chez moi que j'ai découvert une partition, glissée parmi d'autres parchemins. Ça m'a tout de suite mis la puce à l'oreille. Les premiers mots tracés, je les connaissais.» «Lez armahi»... Le moine archiviste D'où l'explication de l'historien: Dom Hermann, qui avait la haute main sur tout ce qui était livres et documents au couvent, tenait dans ses archives la partition du Ranz des vaches. Et le terme «pressieux», tracé sur un billet, prouve bien qu'il accordait une haute importance à ce document. Mais comment diantre cette partition s'est-elle retrouvée dans un grenier de ferme, «quelque part entre La Tour-de-Trême et Vuippens», selon les termes du brocanteur? Pour l'historien, il faut se souvenir qu'en 1800, le 1er juillet précisément, le couvent de La Part-Dieu brûlait, à la suite d'un incendie criminel. Et les chartreux avaient dû fuir pour se réfugier au château baillival de Vuippens. Conclusion (ou hypothèse) d'Hervé Martenay: dans sa hâte, le moine-mécanicien emporta ce qui lui paraissait le plus important. Gêné par le «ballot», le moine l'abandonnait dans une ferme... où il allait se couvrir de la poussière des ans. Datation certaine L'énigme demeure *Hervé Martenay: La Gruyère au XVIe siècle: les arts et les affres (Université de Lausanne, 1993) Pierre Gremaud / 31 mars 2001 Ce chant traditionnel conserve aujourd'hui encore toute sa vitalité, sa vigueur et le mystère des émotions qu'il suscite chez l'auditeur. Lyoba est également le symbole de la continuité et le point d'orgue de la fameuse Fête des Vignerons à Vevey. Vous voulez en apprendre plus sur le cor des Alpes ,ses origines, sa fabrication, son intégration actuelle dans la musique classique?
La partition du «Ranz des vaches», en notation losangée, datée de 1527
Ces mots: Lez armahi di Colombètè, avec une enluminure pour l'initiale L. Mais Albert Visinand n'imagine pas qu'il est au début d'un véritable parcours du combattant. Sur le conseil d'un ami, il prend contact avec un historien. Coup de chance! L'historien, Hervé Martenay, connaît bien le sujet pour avoir publié son mémoire de licence sur la période charnière du XVIe siècle en Gruyère*. Prudemment, l'historien analyse le document: sa texture, sa graphie. Aujourd'hui, il est formel: la partition date de la première moitié du XVIe siècle. Elle est l'œuvre d'un moine du couvent de La Part-Dieu, Frère Angelo, d'origine italienne. Mais s'agit-il pour autant du premier Ranz des vaches authentique? Patience...
Avec une patience de... bénédictin, Hervé Martenay confronte les autres «papiers», d'apparence anodine, qui font partie de la liasse. Sur un simple bout de billet, il découvre ces mots: «Fond de Frère Angelo. Pressieux.» Révélation! Cette écriture, il la connaît pour avoir tenu en main le livre de Dom Hermann, le fameux moine-mécanicien de La Part-Dieu, qui a écrit ses mémoires en près de 20000 alexandrins. Nouvelle confrontation, graphologique celle-là. Pas de doute: ces mots sont bien de la main du moine-mécanicien. Mais nous voici au XVIIIe siècle... Dom Jean-Joseph Hermann (1753-1821) a laissé son nom comme inventeur, entre autres, de la célèbre pendule à automates qu'il avait construite pour se faire réveiller. Célèbre sous le qualificatif de «moine-dormeur», on lui prête d'ailleurs ces dernières paroles sur son lit de mort: «Enfin je m'éveille!» Or, ce personnage singulier était également l'archiviste de La Part-Dieu.
Jusqu'au jour où le brocanteur découvre le «trésor». Un terme qu'il balaie d'un revers de main: «Ça m'a valu plus de soucis qu'autre chose! Mais enfin, il est vrai, c'est toujours ça de pris!» De sa poche (souligne-t-il), Albert Visinand a fait procéder à une étude par une entreprise saint-galloise spécialisée dans la datation des parchemins. Résultat: le document remonte à 1527. Compte tenu d'une marge d'erreur de dix ans, la partition est quoi qu'il en soit antérieure au plus ancien Ranz des vaches connu à ce jour, daté de 1545. Et encore ce Ranz de 1545 est-il d'origine appenzelloise, avec un «lobe» au lieu du célèbre «lyôba». Pour en avoir le cœur net, l'historien Hervé Martenay s'est adressé à un musicologue... sans lui donner la moindre indication à propos du parchemin. Premier constat du musicologue Urs Heinrich, de Thoune: l'écriture musicale, en clé d'ut, est typique de la période de Josquin des Prés. La notation en losanges, qui a succédé à la notation carrée, reporte «au plus tôt» à la fin du XIVe siècle. Les deux cercles (le premier avec un point au centre) désignent, en termes savants, une «prolation» binaire, puis ternaire. Quant au texte, qui n'«épouse» pas directement la ligne mélodique, aucun mystère à ce sujet: on peut le comparer au «Kyrie eleison», noté comme inflexion de départ, l'interprète devant se «charger» de placer les syllabes. Conclusion du musicologue: en tenant compte de l'enluminure formant le L initial, on pense à l'œuvre d'un moine. Un musicien de haut vol, certes, mais pour qui l'esthétique de la partition était secondaire.
Demeure une inconnue, et de taille! Le texte des couplets fait défaut. L'historien, qui se montre catégorique sur l'authenticité de la partition, se borne à ce constat: «Même si ce manuscrit original est resté durant près de cinq siècles aux oubliettes, cela n'a pas empêché le Ranz des vaches de se perpétuer, par tradition orale.» Et de conclure, philosophe: «L'histoire est faite de temps forts, de temps pleins, mais aussi de bon nombre de vides!» Il n'en va pas moins poursuivre ses recherches. Et si, d'aventure, une nouvelle découverte se faisait jour?
Certains d'entre nous rêvent même secrètement de voir ce chant émouvant accéder au titre de nouvel hymne national ... mais ça, c'est une autre chanson!
LA PARTITION (POUR LE COR DES ALPES)
Extrait de : Das Alphorn in der Schweiz, Verlag Paul Haupt Bern ISBN 3-258-02363-8 (1976)
L IObA -
Voici un poème du poète vaudois Eugène Rambert (1830-1886) évoquant ce champ alpestre. Encore une fois le thème de la nostalgie apparaît, aux milieux de thèmes agrestes et patriotiques plus convenus (et moins à la mode):
Lioba
D'où nous vient-il, ce vieux refrain,
Qui fait pleurer, qui fait sourire ?
D'où nous vient-il, que veut-il dire,
Ce ranz naïf, grave et serein,
Lioba, lioba ?
Voix des bergers, voix des abîmes,
Voix des torrents, des rocs déserts,
Il vient à nous du haut des airs,
Comme un écho des blanches cimes.
Lioba, lioba !
Sur l'Alpe aux flancs vertigineux
Il flotte dans l'air qu'on respire ;
Aux forêts le vent le soupire,
Et les monts se disent entre eux
Lioba, lioba !
Dans cette idylle douce et fière
La Liberté nous a souri.
Combien de fois le cor d'Uri
A-t-il sonné sur la frontière
Lioba, lioba !
Exilés sous d'autres climats,
Regrettons-nous l'Alpe fleurie ?
Ce vieux refrain, c'est la patrie
Qui nous suit, chantant sur nos pas :
Lioba, lioba !
Dans les douleurs de l'agonie,
De Sempach le héros vainqueur
L'écoutait au fond de son cœur
Eclater en flots d'harmonie
Lioba, lioba !
Voix de courage, voix d'amour,
Au timbre fort, joyeux et tendre,
Nos fils aussi sauront l'entendre
Et l'accompagner à leur tour.
Lioba ! lioba !
Laissons à d'autres les chimères,
Gloires, grandeurs, tristes appas !
Le seul bien qui ne lasse pas,
Nous l'avons reçu de nos pères.
Lioba, lioba !
La liberté simple et sans fard,
Suisse, voilà ton apanage !
Garde-la pure d'âge en âge,
La liberté du montagnard.
Lioba, lioba !
Pour dominer l'orchestre immense
Dans le concert des nations,
Il faut des hautes régions
Qu'au ciel toujours ce chant s'élance :
Lioba, lioba !
Heimweh
Voici un texte de l'historien anglais qui a voyagé en Suisse à la fin du XVIIIème, qui explique pourquoi le Ranz des vaches fut interdit dans les troupes françaises:
Entre le lac et le Jura coulent plusieurs petites
rivières qui jaillissent des rochers en torrens assez
considérables, et qui, après avoir mis quelques
roues en mouvement, vont se perdre dans le lac
à peu de distance de leur source. La plupart des
rivières de ce pays ont la même origine. La plus
considérable de toutes est la Serrière qui naît
dans le voisinage d' un village de même nom, que nous
avons traversé aujourd'hui en allant à Colombier .
Nous avons dîné dans ce dernier lieu chez des
personnes que nous avions vues aux bains de Leuk ,
et avec lesquelles nous venons de passer une journée
des plus agréables. Nous avons été reçus avec
cette cordialité et ce plaisir non affecté qui
inspirent la véritable politesse. Je vous l'ai dit
plusieurs fois : je ne puis parler trop
avantageusement de l' honnêteté franche et naturelle
qui distingue les suisses d' un certain rang.
Après dîné, quelques musiciens nous ont fait
entendre le ranz des vaches , cet air célèbre que
l' on défendit de jouer dans les troupes suisses qui
étoient au service de France, parce qu' il éveilloit
dans le coeur des soldats un souvenir si vif de leur
terre natale, qu' il leur inspiroit une sombre
mélancolie, et occasionnoit de fréquentes désertions.
C' est ce regret de la patrie que les françois
appellent maladie du pays . Le ranz des vaches
n' a rien, à mon gré, de bien frappant ; mais comme il
paroît composé des intonations les plus simples,
on doit peu s' étonner du pouvoir que sa mélodie
avoit sur les suisses transportés dans une contrée
étrangère. Rien ne ranime plus puissamment en
nous la mémoire du passé qu' un air chéri que nous
étions accoutumés d' entendre, dans le tems de nos
premières et de nos plus douces liaisons. En
quelqu'occasion qu' on nous le rappelle, il amène avec
lui une longue suite d' idées étroitement enchaînées,
et si la plus froide insensibilité n' a pas flétri
notre âme, elle est profondément émue, et la
mélancolie s' en empare. On observe que les habitans
des pays montueux sont beaucoup plus sujets que
d' autres à la maladie du pays ; cela n' est point
étonnant : leurs habitudes et leur genre de vie
sont totalement différens de tout ce qu' ils
trouvent ailleurs. C' est par cette raison que les
montagnards écossois et biscayens, éloignés de leur
patrie, sont aussi disposés que les suisses à être
vivement affectés de tout ce qui peut la rappeller
à leur esprit.
Coxe, William (1747-1828). Lettres de M. William Coxe à M. W. Melmoth sur l'état politique, civil et naturel de la Suisse
Photo: http://www.flickr.com/people/biomaxi/
ahabà (amour agape dans la première alliance) a a a, 3 voyelles a plus h et b,
nous savons maintenant que son nom est compris dans le L io b a suisse
I E O U A,
que des voyelles de la bouche qui s'ouvre toujours plus en un souffle et qu'un nouveau né peut dire.
soit articulé en manière trinitaire
I O A
le Père,
I E sh O U A le Fils, avec sh, le shin qui signifie l'humanité en Dieu et
A ll E U I A le St Esprit, avec 2 L, car il souffle comme il veut
Malachie, fin de la première alliance, finit en disant:
Il ramènera le coeur des pères à leurs enfants, Et le coeur des
enfants à leurs pères, De peur que je ne vienne frapper le pays
d`interdit.
et la nouvelle alliance commence par une généalogie de pères et de fils...
Le monde moderne fait exactement le contraire, il tue les lignées, les mariages, l'amour...
Choisi la Vie, ou la mort...
SI QUA FATA SINANT
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La Cathédrale de Lausanne conserve miraculeusement un vitrail d'époque dans sa superbe rosace à 14h00 (voir l'illustration ci-dessus) avec écrit à sa droite «humeris oculos…» « les yeux de l'épaule, du fardeau des parents». Les livres d'histoires écrits par les francs-maçons ne parlent eux que d'un « anencéphale». De nombreux miracles de résurrection d'embryons de fausses couches sont recensées à Lausanne. La crise a commencé quand les chanoines et clercs de la Cathédrale ont commencé à se moquer de la douleur des parents et à ne vivre que d'impôts pris sur les juifs de Lausanne qui vivaient de l'usure sur les chrétiens de Lausanne.
Explications rapides pour votre méditation.
Va voir à Sichem s'il y a la paix, dit Jacob à son fils.
L'Eglise a commencé à tomber à partir du moment où quelques prêtres ont refusé les cérémonies de sauvetage et au même moment historique, ils ont commençé à vivre de l'intérêt.
Les animaux sont mieux protégés. |
«Ranz des Vaches»
La partition a été retrouvée
La nouvelle est d'importance: on connaît désormais l'auteur du «Ranz des vaches». Il s'agit d'un moine du couvent de La Part-Dieu, Frère Angelo. Mais comment diable a-t-on pu remonter à cette source du début du XVIe siècle? Une vraie saga.
La partition du «Ranz des vaches», en notation losangée, datée de 1527
«J'avais le cœur battant!» Un peu qu'il s'en souvient, Albert Visinand, de ce moment où il a constaté qu'il avait en main la partition du Ranz des vaches. Brocanteur dans le Pays-d'Enhaut, il s'occupe notamment du débarras de caves et galetas. «On m'avait demandé pour un débarras après décès, dans une ferme. Au grenier, j'ai emporté, sans y prêter spécialement attention, un carton avec des liasses de papier ficelées. Du tout-venant! Ce n'est que de retour chez moi que j'ai découvert une partition, glissée parmi d'autres parchemins. Ça m'a tout de suite mis la puce à l'oreille. Les premiers mots tracés, je les connaissais.»
«Lez armahi»...
Ces mots: Lez armahi di Colombètè, avec une enluminure pour l'initiale L. Mais Albert Visinand n'imagine pas qu'il est au début d'un véritable parcours du combattant. Sur le conseil d'un ami, il prend contact avec un historien. Coup de chance! L'historien, Hervé Martenay, connaît bien le sujet pour avoir publié son mémoire de licence sur la période charnière du XVIe siècle en Gruyère*. Prudemment, l'historien analyse le document: sa texture, sa graphie. Aujourd'hui, il est formel: la partition date de la première moitié du XVIe siècle. Elle est l'œuvre d'un moine du couvent de La Part-Dieu, Frère Angelo, d'origine italienne. Mais s'agit-il pour autant du premier Ranz des vaches authentique? Patience...
Le moine archiviste
Avec une patience de... bénédictin, Hervé Martenay confronte les autres «papiers», d'apparence anodine, qui font partie de la liasse. Sur un simple bout de billet, il découvre ces mots: «Fond de Frère Angelo. Pressieux.» Révélation! Cette écriture, il la connaît pour avoir tenu en main le livre de Dom Hermann, le fameux moine-mécanicien de La Part-Dieu, qui a écrit ses mémoires en près de 20000 alexandrins. Nouvelle confrontation, graphologique celle-là. Pas de doute: ces mots sont bien de la main du moine-mécanicien. Mais nous voici au XVIIIe siècle... Dom Jean-Joseph Hermann (1753-1821) a laissé son nom comme inventeur, entre autres, de la célèbre pendule à automates qu'il avait construite pour se faire réveiller. Célèbre sous le qualificatif de «moine-dormeur», on lui prête d'ailleurs ces dernières paroles sur son lit de mort: «Enfin je m'éveille!» Or, ce personnage singulier était également l'archiviste de La Part-Dieu.
D'où l'explication de l'historien: Dom Hermann, qui avait la haute main sur tout ce qui était livres et documents au couvent, tenait dans ses archives la partition du Ranz des vaches. Et le terme «pressieux», tracé sur un billet, prouve bien qu'il accordait une haute importance à ce document. Mais comment diantre cette partition s'est-elle retrouvée dans un grenier de ferme, «quelque part entre La Tour-de-Trême et Vuippens», selon les termes du brocanteur? Pour l'historien, il faut se souvenir qu'en 1800, le 1er juillet précisément, le couvent de La Part-Dieu brûlait, à la suite d'un incendie criminel. Et les chartreux avaient dû fuir pour se réfugier au château baillival de Vuippens. Conclusion (ou hypothèse) d'Hervé Martenay: dans sa hâte, le moine-mécanicien emporta ce qui lui paraissait le plus important. Gêné par le «ballot», le moine l'abandonnait dans une ferme... où il allait se couvrir de la poussière des ans.
Datation certaine
Jusqu'au jour où le brocanteur découvre le «trésor». Un terme qu'il balaie d'un revers de main: «Ça m'a valu plus de soucis qu'autre chose! Mais enfin, il est vrai, c'est toujours ça de pris!» De sa poche (souligne-t-il), Albert Visinand a fait procéder à une étude par une entreprise saint-galloise spécialisée dans la datation des parchemins. Résultat: le document remonte à 1527. Compte tenu d'une marge d'erreur de dix ans, la partition est quoi qu'il en soit antérieure au plus ancien Ranz des vaches connu à ce jour, daté de 1545. Et encore ce Ranz de 1545 est-il d'origine appenzelloise, avec un «lobe» au lieu du célèbre «lyôba». Pour en avoir le cœur net, l'historien Hervé Martenay s'est adressé à un musicologue... sans lui donner la moindre indication à propos du parchemin. Premier constat du musicologue Urs Heinrich, de Thoune: l'écriture musicale, en clé d'ut, est typique de la période de Josquin des Prés. La notation en losanges, qui a succédé à la notation carrée, reporte «au plus tôt» à la fin du XIVe siècle. Les deux cercles (le premier avec un point au centre) désignent, en termes savants, une «prolation» binaire, puis ternaire. Quant au texte, qui n'«épouse» pas directement la ligne mélodique, aucun mystère à ce sujet: on peut le comparer au «Kyrie eleison», noté comme inflexion de départ, l'interprète devant se «charger» de placer les syllabes. Conclusion du musicologue: en tenant compte de l'enluminure formant le L initial, on pense à l'œuvre d'un moine. Un musicien de haut vol, certes, mais pour qui l'esthétique de la partition était secondaire.
L'énigme demeure
Demeure une inconnue, et de taille! Le texte des couplets fait défaut. L'historien, qui se montre catégorique sur l'authenticité de la partition, se borne à ce constat: «Même si ce manuscrit original est resté durant près de cinq siècles aux oubliettes, cela n'a pas empêché le Ranz des vaches de se perpétuer, par tradition orale.» Et de conclure, philosophe: «L'histoire est faite de temps forts, de temps pleins, mais aussi de bon nombre de vides!» Il n'en va pas moins poursuivre ses recherches. Et si, d'aventure, une nouvelle découverte se faisait jour?
*Hervé Martenay: La Gruyère au XVIe siècle: les arts et les affres (Université de Lausanne, 1993)
Pierre Gremaud / 31 mars 2001
Ce chant traditionnel conserve aujourd'hui encore toute sa vitalité, sa vigueur et le mystère des émotions qu'il suscite chez l'auditeur. Lyoba est également le symbole de la continuité et le point d'orgue de la fameuse Fête des Vignerons à Vevey.
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